À la fin de la Première Guerre mondiale, de nombreux Juifs, chassés par la misère et l’antisémitisme, fuient l’Europe Centrale, notamment la Pologne et la Russie. Alors que la plupart passent par l’Allemagne sans s’y fixer, certains atteignent la France, et notamment la région de Nancy, où ils trouvent du travail et décident de s’installer.
À cette époque, une petite communauté juive originaire d’Alsace-Lorraine est déjà en place, préférant l’accueil français à la rigueur prussienne.
Par ailleurs, la ville de Nancy accueille depuis 1905 des étudiants juifs étrangers frappés dans leur pays par le numerus clausus, et qui accèdent ainsi à la possibilité de poursuivre des études universitaires de qualité.
Les réfugiés s’installent dans des quartiers vétustes et travaillent souvent dans la banlieue industrielle. Ces nouveaux venus sont jeunes et souvent célibataires. Très vite des mariages ont lieu, des enfants naissent, d’où la nécessité d’un enseignement de type scolaire (héder), incluant l’apprentissage du yiddish et de la religion.
Rapidement, la vie communautaire s’organise. En 1924 est créée, rue de la Vigerie à Nancy, l’ACI, Association Cultuelle Israélite (Rite Polonais). En 1931, cette association s’installe au 55 de la rue des Ponts, où elle abrite des groupements professionnels, des caisses d’entraide, des clubs sportifs (Maccabi), des mouvements de jeunesse et, bien entendu, un héder, une école juive. Les immigrés, désirant s’intégrer à la vie de la cité, se familiarisent avec la langue française et beaucoup deviennent artisans : tailleurs, fourreurs, cordonniers, etc. D’autres choisissent le commerce itinérant et font du colportage. Un peu plus tard, une activité de confection et bonneterie se développe avec la création d’établissements de vente en gros.
Dès 1933, des réfugiés juifs allemands, premières victimes de l’antisémitisme nazi rejoignent Nancy et l’ACI. En 1936, avec l’avènement du Front populaire, les jeunes générations accèdent plus facilement aux études et aux loisirs et constituent un nouvel apport pour l’association.
Engagés, dès 1939, dans ou en marge de la mobilisation générale, les membres de l’ACI, à l’instar de l’ensemble de la communauté juive nancéienne et française, paient le tribut de la barbarie.
À la Libération, les rescapés de la Shoah décident de rouvrir la maison de l’ACI, 55 rues Ponts, qui devient un lieu de retour à la vie et de mémoire. De nombreuses organisations y installent leur siège : Anciens déportés, UJRE (Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide), marchands forains, groupes sportifs (dont la JSN, Jeunesse Sportive de Nancy) et la CCE (Commission Centrale de l’Enfance), chargée de l’organisation de colonies de vacances. Une intense activité culturelle se développe alors dans et autour de l’association.
En 1946, le peintre Emmanuel Mané Katz réalise, à la demande de l’ACI, un vaste tableau évoquant le soulèvement du ghetto de Varsovie et placé dans la salle de conférences. À cette occasion, il offre à l’association trois peintures murales représentant des musiciens juifs (klezmorim). Une plaque murale de sept cents noms à la mémoire des Juifs immigrés déportés et exterminés est apposée dans le hall d’entrée de la maison.
Le 19 mars 1967, l’ACI devient l’ACCI, Association Culturelle et Cultuelle Israélite.
Les activités culturelles se substituant petit à petit aux activités cultuelles, un nouveau changement d’appellation devient nécessaire et le 15 mars 1989, l’association adopte de nouveaux statuts et devient ACJ, Association Culturelle Juive.
Actuellement, l’ACJ développe de multiples activités : conférences, concerts, théâtre, cours de yiddish, projections cinématographiques, activités récréatives. Elle a longtemps édité régulièrement un journal, Le Blik du « 55 », organe d’information et de réflexion sur la vie juive en France et dans le monde. Aujourd’hui, l’information et le débat s’organisent autour de son site internet.
Tous les ans au mois d’avril, l’association commémore, en partenariat avec la Communauté Juive de Nancy, le soulèvement du Ghetto de Varsovie.
L’ACJ s’est donné pour mission de maintenir la pérennité de la culture juive, de perpétuer la mémoire de la Shoah, de lutter contre le racisme, l’antisémitisme et toute forme d’exclusion. Elle se veut ouverte sur le monde et la cité, et travaille volontiers en partenariat avec d’autres associations sur des projets définis.
Sous l’impulsion d’une équipe dirigeante rajeunie, l’ACJ, qui a pour projet affirmé de devenir une Maison Ouverte des Cultures Juives, entre résolument dans le vingt-et-unième siècle. Tout en ayant mis en place, grâce à l’aide publique et privée, un vaste programme de réhabilitation du lieu et de préservation de son patrimoine, avec, notamment, la restauration des peintures de Mané Katz et le catalogage des archives, elle s’est dotée de moyens modernes de communication et de diffusion.
Les nouveaux équipements ont été présentés lors de l’inauguration officielle des locaux le 11 septembre 2007.